Des estimations récentes montrent qu’il y a 385 millions de cas d’intoxication aiguë involontaire aux pesticides par an dans le monde, contre 25 millions de cas estimés en 1990, lit-on dans un communiqué de l’Ipen. «Cela signifie qu’environ 44 % des agriculteurs et des travailleurs agricoles du monde entier sont empoisonnés chaque année par une industrie dominée par des firmes membres de CropLife», indique la pétition.
Une pétition signée par plus de 187 300 organisations de la société civile et de peuples autochtones dans plus de 107 pays, dont la Tunisie, vient d’être adressée au directeur général de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), pour demander l’arrêt du partenariat entre cette organisation et «CropLife International», un lobby mondial en faveur des plus grandes multinationales agrochimiques au monde.
Les signataires, qui qualifient le partenariat FAO-CorpLife d’«alliance toxique», estiment qu’il est «profondément inapproprié » pour l’agence des Nations unies de s’associer avec ce lobby, qui regroupe les firmes Bayer, Syngenta, Corteva Agriscience, FMC et Sumitomo.
En effet, environ un tiers des ventes de ces compagnies proviennent de pesticides hautement dangereux (HHP), ou de pesticides représentant des risques élevés pour la santé humaine et l’environnement, ont fait valoir les signataires de cette pétition, dont l’Association tunisienne de l’éducation environnementale pour les futures générations (Aeefg).
Cette association, qui fait partie du Réseau international pour l’élimination des polluants, dit Ipen (International Pollutants Elimination Network), avait déjà élaboré un rapport intitulé «Highly Hazard Pesticides: Tunisia situation report» (Les pesticides hautement dangereux: Rapport sur la situation en Tunisie), dans lequel elle avait révélé que des pesticides hautement dangereux éliminés en Europe se vendent encore en Tunisie.
Concernant l’alliance dite toxique, l’ONG tunisienne estime qu’«un organisme des Nations unies ne devrait pas se départir de sa neutralité et de son objectivité, d’autant que CorpLife représente les intérêts des entreprises productrices de pesticides», selon sa présidente, Semia Gharbi.
Des estimations récentes montrent qu’il y a 385 millions de cas d’intoxication aiguë involontaire aux pesticides par an dans le monde, contre 25 millions de cas estimés en 1990, lit-on, dans un communiqué de l’IPEN. «Cela signifie qu’environ 44 % des agriculteurs et des travailleurs agricoles du monde entier sont empoisonnés chaque année, par une industrie dominée par des firmes membres de CropLife», indique la pétition.
Parallèlement, des militants du monde entier avaient déjà participé à une Journée mondiale d’action contre ce partenariat. Ils se sont également mobilisés sur les réseaux sociaux pour exhorter la FAO à mettre fin à ce qu’ils appellent une «alliance toxique».
«La FAO est une institution publique qui n’est pas censée répondre aux besoins du secteur privé, dont le but est de vendre des pesticides.
En Ethiopie, nous avons vu les dommages économiques et la dette d’un système dépendant des pesticides. Plus important encore, nous avons bénéficié de la fin de l’utilisation des pesticides, en travaillant avec des agriculteurs appliquant l’agroécologie et les techniques agricoles sans pesticides. Cela a amélioré l’économie locale et protégé les femmes et les enfants menacés par les dommages toxiques et l’héritage des pesticides», a déclaré Dr Tadesse Amera, coprésident de l’Ipen et directeur de Pesticide Action Nexus Ethiopia.
«L’utilisation de pesticides hautement dangereux en Amérique latine et dans les Caraïbes est une préoccupation dans la région, comme l’ont montré les rapports de situation des pays de l’Ipen au Mexique, au Costa Rica, en Jamaïque, au Chili, en Argentine, au Panama, au Paraguay et au Brésil, avec des effets nocifs aigus et chroniques sur la santé et des effets négatifs sur l’environnement », a déclaré Fernando Bejarano, coordinateur régional de l’Ipen pour l’Amérique latine et Caraïbes et membre du Pesticide Action Network en Amérique latine.
«Il est temps de promouvoir et d’investir dans des alternatives agroécologiques et transformer les systèmes alimentaires pour soutenir les travailleurs et les communautés rurales autochtones au lieu des sociétés transnationales de pesticides», a-t-il ajouté.
Un partenariat dénoncé
«Le partenariat entre la FAO et CropLife sapera tous les efforts déployés en Afrique pour interdire les pesticides dangereux, et laissera la porte ouverte à l’exportation de pesticides interdits en Europe comme atrazine, paraquat, etc. «Nous dénonçons et rejetons fermement cette « alliance toxique » car elle est en proie à des conflits d’intérêts non connus du public, au détriment de la protection de la santé et de la préservation de l’environnement», a déclaré Maimouna Diene, coordinatrice de PAN Africa.
Pour Javier Souza, coordinateur de PAN Amérique latine (Rapal), «au contraire, la FAO et les gouvernements devraient privilégier la production agroécologique comme base d’un lien global avec l’environnement pour atteindre la souveraineté alimentaire ». Il y a lieu de rappeler que la FAO et CorpLife avaient, depuis 2020, renforcé leur volonté de collaborer «à la recherche de nouveaux moyens de transformer les systèmes agroalimentaires et de promouvoir le développement rural par la voie de l’innovation et de l’investissements sur le terrain».
Depuis la signature en octobre 2020 d’une «lettre d’intention» formalisant un rapprochement stratégique avec CropLife International (CLI), les réactions des ONG et des défenseurs de l’environnement se sont succédé.
Un courrier signé par près de 300 scientifiques et universitaires a déjà été remis au directeur général de la FAO, Qu Dongyu, élu en juin 2019 à la tête de l’organisation.